SOCIETE

Un Haïtien conséquent s’adresse à Père Noël

M. Au bonnet rouge et blanc, on a porté à ma connaissance que vous enfilez votre beau costume rouge pour vous rendre en Haïti afin de procéder à la distribution des cadeaux. Je comprends votre charité ; c’est bien d’avoir un esprit caritatif. En revanche, je vous déconseille d’y mettre les pieds. Si vous êtes déjà en avion, il est préférable de faire demi-tour. Ah oui ! Je vous mets en garde. Si vous faites la sourde oreille, votre venue sera à vos risques et périls. J’ai l’impression que vous faites fi de tout ce que vous voyez sur les réseaux sociaux concernant Haïti. Vous pensez que c’est du buzz ? Non Père Noël. Tout ce que vous voyez sur les réseaux sociaux au sujet d’Haïti est bel et bien réel ; le sang ne cesse de couler vraiment en Haïti. Vous pouvez vous faire kidnapper, voire assassiner par les bandits. Par conséquent, restez où vous êtes pour ne pas voir ajouter du rouge sur votre costume rouge.

M. à longue barbe blanche, on m’a informé également que vous comptez, cette année, venir avec votre compagne en l’occurrence Mère Noël. Quelle déveine prémonitoire ! Vous me faites rire franchement. C’est cette année même que vous comptez venir avec. Vous me faites rire à m’en décrocher la mâchoire. Sera-t-elle le cadeau des gangs ? Sans circonlocutions : yo tap kidnape l pou ou e yo tap kraze’l pou ou.

De surcroît, cela fait des ans, Père Noël, que la population haïtienne ne fête pas Noël comme elle le fêtait autrefois. En effet, il y a Noël d’antan et Noël d’aujourd’hui. Deux Noëls à ne pas confondre.
L’usage de «Fanaux de Noël ; sapin de Noël ; Arbre de Noël ; Chanson de Noël diffusée à longueur de journée sur les ondes ; Feu d’artifice ; Cierge magique ; Baguette magique», n’est plus. C’est une tradition qui se voit disparaitre.

M. au costume rouge, je ne veux pas que vous pensiez que j’ai un problème perso avec vous. D’ailleurs, en Haïti, cette année, nous n’avons pas fêté les autres grands évènements, hormis la fête des morts qui est célébrée tous les deux (2) Novembre de chaque année. Oups ! Excusez-moi Papa Noël, j’ai failli oublier qu’Haïti reçoit exception en tout. Nous ne célébrons pas la fête des morts tous les deux(2) Novembre seulement. Les bandits ont changé la donne ; nous la fêtons tous les jours, surtout avec la mort sans jours.
Papa Noël, laissez-moi vous dire qu’en Haïti le verbe mourir est le verbe le plus conjugué. Qu’il soit mourir de peur, mourir dans les cheveux noirs, mourir comme un chien, mourir de chagrin, mourir d’inanition et mourir de voir une nouvelle Haïti, il est le plus conjugué. Le pire, au temps présent.

M. au bonnet rouge et blanc, je vous ai expliqué plus haut qu’il y a Noël d’antan et Noël d’aujourd’ui, eh bien la différence nette qui existe entre ces deux-là, c’est que dans le Noël jadis on dit l’un l’autre «Joyeux Noël», tandis que dans le nouveau Noël on dit tout simplement «Toutes mes condoléances/ Du courage». En un mot, c’est un Noël qui se transforme en fête des morts, en kidnapping, en drame… Le droit à la vie se transforme en un quelconque droit à la mort. Quel persiflage !

Parallèlement, Père Noël, la population haïtienne m’a demandé de vous communiquer un message. La population haïtienne notamment les gens qui habitent en banlieue de Martissant et ses zones avoisinantes, à croix-des-bouquets et ses zones avoisinantes, tiennent à vous informer que même si vous vous rendez en Haïti, ils ne seront pas en mesure d’aller chercher leur cadeau, car ils sont sédentaires, voire casaniers. Même ceux qui vivent au jour le jour ; l’insécurité oblige !
Ils tiennent à vous dire aussi qu’ils ne savent pas à quel saint se vouer, puisque même en restant chez eux, ils pourraient être atteints d’une balle perdue. Fi ! Zut !
Excusez-moi Père Noël, je suis obligé de pousser des soupirs parce que : Entendre ce genre de chose fend le cœur. À coup sûr, en lisant cette partie, vous vous dites : Mais, j’ai entendu dire qu’il y a un accord de paix entre les gangs rivaux opérant à Martissant et les zones voisines. Méfiez-vous-en Père Noël, c’est un filet qu’on vous tend. Une paix sans déposer les armes(Rire). Une parodie de paix. Cette paix est trop facile pour être vraie ! Je martèle : Ils vous tendent un panneau. UN PANNEAU ; PANNEAU ! Il n’y a point d’armistice, voire de cessez-le-feu.
Par ailleurs, vous pouvez toujours venir et procéder à la distribution des cadeaux de maison en maison en utilisant, pour votre sécurité évidemment, une voiture blindée et aux vitres teintées tout en portant des gilets pare-balles à l’instar du locataire de la primature. Oups ! J’ai failli oublier qu’il n’en est plus locataire. Une sorte de novation en fait de lui le propriétaire. Laquelle novation se fait entre lui et son oncle (ton blan). Si vous ne me croyez pas, observez son comportement lorsqu’il serre la main à un étranger officiel. Nèg isit ! Humm !

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M.au costume rouge, ces considérations ne veulent pas dire que vous ne pouvez pas nous offrir un cadeau. Nous sommes à l’ère numérique, par conséquent vous pouvez le faire à distance. Toutefois, cette année, permettez-nous de vous demander ce que nous voulons recevoir en cadeau. À l’état où nous sommes, un seul cadeau nous intéresse. Ce cadeau fait l’unanimité en Haïti.
Ce cadeau n’est autre que :
SÉCURITÉ
Ironie du sort : Nous demandons en cadeau quelque chose qui nous revient de droit. En tout cas, je ne regrette pas avoir dit, plus haut, qu’Haïti reçoit exception en tout.
Ici, SÉCURITÉ est utilisée avec sa dénotation et ses connotations. Il en résulte que nous voulons le démantèlement des gangs dans les quatre(4) coins du pays, l’arrestation et la punition des bandits en costard, la diminution du prix des denrées alimentaires (sécurité alimentaire), entre autres.

L’homme à barbe blanche, je sais que vous êtes en train de vous demander qui a mis Haïti dans ce bourbier. Petite correction Père Noël, ils sont plusieurs. Je vous éclaire la lanterne sans aller par quatre chemins : Ce sont les protagonistes qui ont mis Haïti dans cette gêne, des voyous en costard, des narcotrafiquants revêtus un vêtement politique. Des soi-disant politichiens qui sont d’une cupidité sans bornes. Oupelaille ! Pardonnez-moi ce lapsus Père Noël. Des politiciens et non politichiens. Des politiciens qui vendraient même leur Père et Mère pour gagner de l’argent ; ils ont bâti, pour la plupart, leur fortune sur le sang. Pour accéder au pouvoir, ils promettent monts et merveilles, et après leur accession on rend compte qu’en revanche l’homme à bord du pouvoir n’est pas l’homme au pouvoir.

Papa Noël, les politiques de mon pays, lorsqu’ils sont de l’opposition, ils incitent le peuple à descendre dans les rues, à enflammer des pneus et à ériger des barricades. «Barikad nou se avni nou», martèlent-ils. A contrario, lorsqu’ils sont au pouvoir, ils font ce pourquoi ils ont incité la population à gagner les rues, à enflammer des pneus et à ériger des barricades. Ce sont des hommes sans scrupules ! Des caméléons en politique.
M. au costume rouge, ici, cette lettre touche à sa fin. Non pas parce que j’ai vidé mon sac, mais parce que je n’ai plus d’encre, d’autant plus que ces vérités pourraient me couter la vie.

«Restez où vous êtes pour ne pas voir ajouter du rouge sur votre costume rouge.»

Expéditeur : Shadrack JAVEL
Juriste/Communicateur

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