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POUR HONORER LA MEMOIRE DU PROFESSEUR ANTOINE WILFRID LAMBERT, ANCIEN DIRECTEUR ADMINISTRATIF DU RECTORAT DE L’UEH

Chère Madame Lambert,
Chers enfants, chère Valérie,
Chers parents, chers membres de la famille,
Chers collègues du Rectorat
Chers anciens collaborateurs du Directeur, Secrétaire Général, Directeur Général, Professeur Antoine Wilfrid Lambert
Chers collègues professeurs, chers étudiants
Chers amis,

Dans notre pays meurtri, sempiternellement souffrant, il y a de ces citoyens modèles qui peuplent notre quotidien et dont l’action assidue, discrète, a transformé nos vies et nos institutions sans que nous ne nous en rendions compte.

Le Directeur Antoine Lambert était de ceux-là.

On connait ses compétences académiques, sa rigueur administrative, sa longue expérience de notre administration publique, sa connaissance profonde des hommes et des choses de notre pays, son intégrité et son sens des responsabilités. On connait sa bonhomie, son expression toute de bonté et d’empathie, sa grande sagesse, son humilité. On connait moins sa contribution substantielle à l’UEH et la lourde dette de reconnaissance que nous avons contractée envers cet administrateur hors pair qui a permis à notre université de grandir et, notamment, de gérer et de réussir deux tournants majeurs de son existence :

  • La transformation de l’Ecole Nationale des Hautes Etudes Internationales en Institut National d’Administration, de Gestion et des Hautes Etudes Internationales (INAGHEI) ;
  • La mise en œuvre du régime d’autonomie et d’indépendance de l’UEH confirmé par la Constitution de 1987 et règlementé par les Dispositions Transitoires de février 1997.

Antoine Lambert a intégré l’INAGHEI en 1974 comme professeur et en devient très vite le Secrétaire Général. L’institut ne comptait alors qu’une année d’existence et devait mettre en œuvre 3 nouveaux départements, l’Administration, la Gestion, la Comptabilité, à côté de celui des relations internationales créé depuis 1958. C’était la première fois dans notre pays que ces disciplines allaient être enseignées à ce niveau. Un véritable défi que d’assurer le Secrétariat Général de cette nouvelle entité, d’autant plus que le Doyen d’alors le dynamique et progressiste Gerard Dorcély était souvent appelé à d’autres fonctions : ministre des Affaires Etrangères, Ministre de l’Education Nationale, Président de la Commission Administrative, entre autres. Le Professeur Lambert a su se révéler un collaborateur efficace, discipliné, loyal et compétent durant plus d’une décennie. C’était la belle époque de l’INAGHEI devenue entretemps l’un des plus beaux fleurons de l’UEH, si ce n’est le plus beau. On se souvient encore de la qualité de l’enseignement dispensé, du prestige que conférait le statut d’étudiant de l’INAGHEI. Il y avait ce projet de coopération avec l’Université Laval. Il y avait cette pléiade de grandes figures de notre enseignement universitaire dont Gerard Gourgue, Edriss St-Amand, Léonce Thélusma, Sylvie Théard, … Il y avait ce rapprochement entre l’Institut et son environnement, particulièrement le secteur des affaires et l’administration publique qui s’alimentaient régulièrement et avec enthousiasme de ses produits si recherchés à cette époque. Il y avait aussi les « Samedis de l’INAGHEI », les « Cahiers de l’INAGHEI », de rares espaces de débats et de publication académiques mis en place par le Comité des Etudiants d’alors avec l’autorisation des dirigeants en dépit du régime politique dominant.

Sous la direction d’un Décanat avisé, Antoine Lambert a su se mettre à la hauteur de ces défis et contribuer efficacement à y faire face. Car Antoine Lambert se prévaut d’une solide formation académique, acquise à l’Institut Commercial Joseph Poujol, au Centre d’Etudes Commerciales, à l’Institut Haïtien de Statistiques, au Centre Interaméricain d’Enseignement Statistiques (CIENES), à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques, à l’Institut des Hautes Etudes Commerciales et Economiques.

Son mandat à l’INAGHEI prit fin en 1987.

Mais l’histoire du Professeur Lambert avec l’UEH ne s’est pas arrêtée en si bon chemin. Une nouvelle aventure l’attend, encore plus exaltante, plus épanouissante mais aussi plus exigeante. La Constitution de 1987 a confirmé le statut d’indépendance de notre Alma Mater et proclamé son autonomie. Mais comment concrétiser ces concepts ? Comment assurer l’intégration à la nouvelle UEH d’entités fonctionnant depuis leur création sous la tutelle des Ministères liés à leur domaine d’intervention ? Comment renforcer ou même créer un véritable Rectorat, c’est-à-dire une Administration Centrale digne de ce nom, capable de remplir correctement ses fonctions de supervision, de coordination, d’orientation, d’appui, de contrôle, d’évaluation ? Au lieu de ce simple rôle de boite aux lettres que le régime politique lui avait assigné.

La promulgation des Dispositions Transitoires de février 1997 relatives à l’Administration Centrale de l’UEH rendra la tache encore plus urgente mais encore plus délicate dans un contexte marqué par un double mouvement au sein de l’Université. D’un côté, ceux qui réclamaient à tue-tête la Réforme de l’UEH et son adéquation aux nouvelles règles constitutionnelles. Et de l’autre, le poids de la tradition, les habitudes séculaires d’entités qui ont déjà eu une longue pratique de fonctionnement autonome avec leur propre loi organique, leur propre administration, leur propre campus, leur propre idiosyncrasie. Et pour comble, les nouveaux dirigeants, désormais démocratiquement élus, ne disposaient pas toujours de l’expérience administrative nécessaire.

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C’est dire tout le poids qui reposait sur les épaules du Professeur Antoine Lambert qui avait entretemps, en 1992, intégré le Rectorat en tant que Directeur Administratif. Heureusement, devrions -nous ajouter, en cette période à la fois exaltante et difficile de notre Université et du Rectorat lui-même, instance essentiellement administrative.

Il lui a fallu tout son savoir-faire, toute sa science, toute son expérience, mais aussi tout son courage, tout son sens des responsabilités pour aider, pour accompagner, pour proposer les réformes nécessaires dans son champ d’action, pour innover, pour répandre les bonnes pratiques, pour donner l’exemple de la compétence, de l’intégrité, de l’efficacité, ,mais aussi pour veiller, pour conseiller, pour avertir, pour aviser, pour éviter des faux pas, avec toute la loyauté et tout l’amour de l’institution qui le caractérise.

Il aura donc permis à l’UEH de réussir cette transition, de mettre en place les premières pierres de la construction d’une Administration Centrale capable de répondre aux nouvelles exigences du moment, à la hauteur du nouveau statut constitutionnel d’indépendance et d’autonomie acquis de haute lutte par la communauté universitaire et le mouvement démocratique national.

Et quand est venu pour lui le moment de partir, il l’a fait la tête haute, avec sa bonhomie naturelle. Le témoignage de son successeur, le Dr Thadal Etienne, est à ce sujet saisissant :

« J’ai succédé à Monsieur Antoine LAMBERT, en octobre 2009, au poste d’Administrateur (Directeur des affaires administratives) de l’UEH.

« Contrairement à la tradition haïtienne qui veut que les relations entre un successeur et son prédécesseur soient antagonistes, celles entre Monsieur Lambert et moi furent très cordiales, collaboratives…

« À ma nomination à ce poste qu’il occupait pendant près de deux décennies, Il a accepté de faire une réelle passation de dossiers et de continuer à collaborer avec nous comme consultant, jusqu’à son départ pour de bon à la retraite, environ 2 ans plus tard.

« Je garde de lui le souvenir d’un homme humble, malgré sa bonne maîtrise des questions administratives ».

Le Professeur Thadal conclut son témoignage en disant : Il a été un grand serviteur de l’État ! »

A ce sujet, je pourrais vous parler aussi de sa longue carrière administrative de près de 60 ans, débutée en 1954 au service des Télégraphes et Téléphones, qui s’est poursuivie à l’Office National du Café, à l’IHPCADE, au ministère des Affaires Etrangères, au PEPPADEP, au Commissariat des Haïtiens d’Outre-Mer, au ministère de l’Administration et de la Fonction Publique, au ministère de la Planification et de la Coopération Externe, au ministère de la Défense Nationale et j’en passe. Il a été décoré du Diplôme « Honneur et Mérite » en deux occasions : la première en 1983, au grade de Commandeur, la deuxième en 1984 au Grade de Grand Officier.

En ces moments difficiles, d’incertitudes et de désespérance que vit notre pays, où l’Etat lui-même peine à faire valoir son effectivité, il est bon, il est réconfortant, de savoir et de rappeler qu’il a existé et qu’il existe encore des citoyens comme le professeur Antoine Lambert qui, dans leur sphère d’action, tout en demeurant humbles et discrets, ont marqué leur passage et ont positivement impacté leur institution d’appartenance. Pour nous tous, pour notre génération, pour les plus jeunes et pour les générations qui viennent, Antoine Wilfrid Lambert demeure un modèle, une référence, un exemple.

A Mme Lambert, à ses enfants, à Valérie particulièrement, sa fille qui fait partie de notre communauté, à toute la famille, à ses amis, à ses collaborateurs, ses étudiants de l’INAGHEI et de l’IERAH, nous présentons nos plus sincères sympathies et notre plus totale solidarité.

Que son âme repose en paix auprès de tous ces héros anonymes qui fertilisent la terre d’Haïti.

4 janvier 2024

FRITZ DESHOMMES
RECTEUR

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