SOCIETE

Pour la construction du rêve haïtien!

À mon feu père qui a favorisé ma socialisation politique précoce dès ma plus tendre enfance, je veux faire cette promesse : peu importe le prix à payer, je resterai au chevet d’Haïti jusqu’à son rétablissement.

C’est une promesse délicate dans un pays où le spectre grimaçant du désespoir se fait chair à travers le kidnapping et les assassinats en série, au mépris de la liberté individuelle et du droit à la vie.

Je dois avouer que je comprends et respecte la motivation de la légion des jeunes qui veulent quitter Haïti. Il est clair que l’apartheid socio-économique ambiant ne leur a pas donné le choix. Vouloir partir loin des rives haïtiennes est donc d’une paradoxale légitimité. J’en conviens.

Mais, il n’est pas vain de rappeler que c’est à nous qu’il revient de construire le rêve haïtien. « THE AMERICAN DREAM » est une construction historique qui s’est nourrie de l’apport de plusieurs générations successives d’Américains. Aucun hasard ! Aucun accident ! Mais une vision ! Des idées en mouvement ! Une philosophie (libérale) qui s’est faite chair ! Des hommes et des femmes qui ont forgé le destin collectif d’un peuple ! Une nation qui s’est édifiée tant sur des mythes fondateurs que sur le règne de la science.

Par conséquent, le rêve haïtien peut lui aussi être construit. Par qui ? Par nous ! Haïtiennes et Haïtiens.

À mes frères et soeurs qui partent, je veux dire ceci : allez accumuler du capital ailleurs pour (revenir) construire Haïti ! Tant le capital culturel que le capital économique nous seront utiles dans le processus de relèvement de notre chère Haïti.

Rester en Haïti pour construire le rêve haïtien est la norme. Cependant, partir peut être légitime à condition qu’il soit un moyen pour revenir mieux armé pour affronter nos vieux démons et faire d’Haïti une référence pour le monde entier.

À mes frères et soeurs qui sont obligés de partir aujourd’hui, je souhaite du succès ! Accumulez le savoir ! Accumulez l’avoir ! Soyez cette diaspora haïtienne de demain qui investira massivement dans des projets d’envergure dans les 10 départements du pays pour aller à contre-courant du paradigme de l’assistanat.

À mes frères et soeurs qui s’en vont massivement aux États-Unis, je veux dire ceci : inspirez-vous de « the American Dream » aujourd’hui pour donner forme à « The Haitian Dream » demain. C’est seulement à cette aune que l’histoire mesurera votre succès collectif. Sinon, vous n’aurez été que des numéros travaillant à la chaîne dans les fabriques nord-américaines pour assouvir les appétits consuméristes induits par le grand capital.

Partez ! Partez ! Mais partez pour revenir mieux équipés au chevet d’Haïti ! Partir ne peut valoir quelque chose qu’à condition de l’inscrire dans une finalité plus grande : revenir pour donner une matérialité au rêve haïtien. Mais comment revenir ? Sous forme des grands projets à venir et/ou physiquement. Cela dit que chacun est libre de vivre là où il l’entend. Je ne suis pas extrémiste au point de vouloir imposer à quiconque la dictature du « vivre en Haïti ». Mais je suis convaincu qu’il est plus facile pour un Haïtien de quitter le territoire national que de parvenir à extirper Haïti de son coeur. Tu peux quitter Haïti, mon frère ! Tu peux quitter Haïti, ma soeur ! Mais, saches qu’Haïti ne te quittera jamais ! Autant dire que tu dois toujours penser à te mettre disponible pour revenir au chevet de ton cher pays demain dès l’aube.

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À Jorchemy Jean Baptiste, mon frère de combat qui a choisi de rester comme moi, à tous les signataires de l’accord du 21 décembre 2022, je veux rappeler que nous n’avons pas droit à l’erreur. Aux membres du HCT, au Premier ministre Ariel Henry, aux futurs membres de l’OCAG, aux futurs membres du Gouvernement remanié et à tous ceux et à toutes celles qui sont et/ou seront impliqués dans la gouvernance de la transition, d’une façon ou d’une autre, je veux souligner la lourdeur du devoir qui vous appelle. Contre vents et marées, il faut commencer à insuffler de l’espoir aux jeunes Haïtiens ! Relisez l’accord du 21 décembre et dites vous que son application peut frayer un chemin vers une stabilité politique minimale indispensable à la sérénité du climat socio-économique global.

Aux non-signataires de l’accord du 21 décembre revient la lourde responsabilité d’animer le jeu du débat démocratique pour mitiger les éventuelles dérives. L’essentiel étant de sauver Haïti, fou serait celui qui ose diviser Haïti entre signataires, d’une part, et non-signataires, d’autre part. Non ! Nous sommes tous des Haïtiens appelés à donner vie au rêve haïtien.

Pour finir, je rappelle à celles et ceux qui partent que celles et ceux qui restent sont solidaires de leur sort. Celles et ceux qui restent et qui ont un rôle dans la gouvernance sont à un carrefour historique décisif. Du succès de leur gouvernance dépendra, en partie, le retour tant souhaité de nos compatriotes qui partent, préssurés par l’insécurité et la misère.

Ensemble, faisons de 2023 l’année zéro du processus de construction du rêve haïtien. Ensemble, insufflons de l’espoir aux millions de jeunes Haïtiens ne demandent pas plus que le droit de pouvoir vivre en toute dignité dans le pays qui les a vus grandir.

Vive Haïti !

P.S : Je viens d’écrire ces quelques mots en pensant au deuxième livre que Jorchemy Jean Baptiste et moi allons publier cette année. Ce livre sera consacré à notre vision du développement d’Haïti en prenant comme prétexte d’analyse les Départements du Nord et de l’Artibonite.

Pascal ADRIEN
Dimanche 19 Février 2023

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